Ingenuus était commandant en chef des légions de Pannonie (Hongrie actuelle) et de Mésie (Bulgarie actuelle). Il était aussi chargé de la formation militaire du jeune Valérien II, fils de l'empereur Gallien et héritier présomptif du trône impérial romain.
Or, en 258, le jeune César s'en vint à mourir.
Peut-être le général Ingenuus n'avait-il pas la conscience tranquille ? Peut-être était-il responsable de cette disparition aussi soudaine que prématurée ? Nous n'en savons rien. Mais quoi qu'il en soit, à la mort du jeune Valérien, son mentor Ingenuus n'eut rien de plus pressé que de revêtir la pourpre impériale et de se faire proclamer empereur par ses troupes.
L'empereur Gallien, on le croira volontiers, n'accepta d'un cœur léger ni la mort suspecte de son rejeton ni la trahison du chef chargé de défendre une des frontières les plus menacées de l'Empire. De plus, il est probable que, pour une raison que nous ignorons, l'empereur prit très au sérieux la menace qu'Ingenuus faisait peser sur son trône. Sans ces fort bonnes raisons, Gallien n'aurait certainement pas réquisitionné toutes les légions stationnées en Gaule, alors que cette province était très dangereusement menacée par les raids dévastateurs des Francs et des Alamans.
Avec une rapidité et une énergie confondante dans le chef de ce souverain que les sources antiques nous décrivent comme un dégénéré apathique, Gallien rassembla donc ses troupes et marcha contre Ingenuus. Les deux empereurs rivaux s'affrontèrent près de Mursa (Croatie actuelle). Ce fut Gallien qui l'emporta grâce à sa cavalerie excellemment commandée par le futur usurpateur Aureolus. Quant à Ingenuus, il prit la fuite et mourut peu de temps après. Nous ne savons exactement s'Il se suicida pour échapper à la vengeance de l'empereur ou s'il fut tué par un de ses soldats.
Son "règne" avait été très bref, et son pouvoir ne fut reconnu que dans très peu de provinces. C'est sans doute la raison pour laquelle nous ne possédons aucune monnaie frappée à son effigie.
Signalons pour terminer que la chronologie de l'usurpation d'Ingenuus reste très controversée. Certains historiens la situent encore en 260, mais la plupart donnent raison à l'auteur de l'Histoire Auguste qui, quant lui, donne l'année 258 (consulat de Tuscus et de Bassus).